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27 août 2007 1 27 /08 /août /2007 23:17

Amis du soir (et de la pleine lune, aouououh !) bonsoir, bonne chasse, bonne baston ou bonne baise, c’est selon…

J’ai un peu déserté ces temps ci pour cause de transformation de l’étage de ma maison en annexe de Cayssiole (l’asile de lunatiques, tiens, on y revient, du nord Aveyron) avec trois folles hurlantes et tapant du pied, puis rencontres d’Aubrac (il y aura un article là-dessus, et ci-dessus d’ailleurs).

 

Mais avant d’accueillir les hordes magnoludoviciennes (ben oui, une horde, ils étaient deux, enfin, avec un chien, ça fait trois, plus deux sanglier, cinq…) j’ai découvert un film ultra culte que tout le monde me conseillait mais que je n’avais jamais eu l’occasion de voir : A CLOCKWORK ORANGE, parce que c’est tellement plus style de parler Anglais (en Allemand pour les goths…), bon, vous auriez deviné le titre français de ce petit bijou aux merveilleux engrenages : Orange Mécanique !

 

Tout d’abord, brisons les mythes : Non, ça n’est pas violent, du moins visuellement parlant, on a vu pire (ou mieux…) depuis : aucun meurtre, pas d’armes à feu, toutes les bastons sont très esthétiques (surtout celle dans le vieux casino au début). La violence serait morale… voir… Il y a bien sûr l’évidente question du libre arbitre, que toute critique soulève comme une devotchka effarouchée (la question, pas le critique, enfin je compte sur vos esprits tordus pour avoir saisi), avec l’aumônier comme porte parole.

 

Je résume le synopsis au cas ou vous ne l’auriez pas vu : Alex, un jeune homme (17 ans dans le film, 14 dans le livre) s’amuse avec ses droogies à fiche un bordel noir (c'est-à-dire une partouse anarchique) en violant et frappant (comme Thorfin le Pourfendeur…) cloches et intellos chtarbés (à noter, ils sont tous complètement secoués dans ce film, pas un de net, ce qui atténue un peu la dite « violence » : aucun n’est entièrement pur et innocent). Un jour il se fait choper et se porte volontaire pour un traitement de choc (mais aucun rapport avec Brad-Asshole et Janet Vice) qui lui permettra de sortir plus vite ce prison. Le traitement repose sur une utilisation des réflexes pavloviens pour associer une impression d’angoisse mortelle et de nausée avec le sexe et la violence (plus la neuvième de Beethoven mais ça c’est le bug de la Matrice…), du coup, ils en font un automate (une « orange mécanique », argot cockney qui pourrait se traduire par « mec chelou »…si seulement St Denis c’était la banlieue de Londres…) non pas bon mais incapable de mal, ce qui n’est pas la même chose puisque la bonté repose sur le choix, tout comme l’humanité, bref, déshumanisation d’Alex, mais ne vous inquiétez pas pour lui, ça s’arrange !

 

J’y vois pour ma part, en outre, quelque chose de Kierkegaardien à propos des stades esthétique et moral (enfin, je ne connais de Kierkegaard que ce que mon prof de philo à bien voulu m’en dire dans sa grande entreprise de désinformation soviéto-maçonique en alliance avec le FBI et les yakuza) : je ne crois pas qu’il y ait quoi que ce soit de choquant, malsain etc… dans la conduite d’Alex et ses camardes, ils n’ont pas de morale, sont dépourvus des notions de Bien et de Mal et vivent dans un univers purement esthétique (pour ma la jouer moraliste moderne je pourrais dire que c’est encore vrai pour beaucoup de « délinquants » de nos jours, question d’éducation, blablabla…), le roman de l’écrivain catholique Burgess illustre dans son dernier chapitre le passage du stade esthétique au stade éthique.

Donc s’il faut juger ce film, c’est à mon avis plus sur l’esthétique que sur la morale, et là, c’est putainnement karacho ! Le Korova milk bar est complètement psychédélique, étrange, tripant, fascinant, puis la scène d’affrontement des bandes, grandiose et génialement chorégraphiée, l’appartement délirant et pop de l’auteur subversif et de sa femme qui bouquine dans un genre de niche barbarellienne vêtue d’une combinaison rouge à même la peau, les sublimes visions d’Alex en écoutant la neuvième de Beethoven, le serpent et le vagin etc... chaque image (ou presque) est une splendeur, un style grandiose. La musique est la trame même du film, elle provoque les visions et les délires, tantôt apaise tantôt provoque, la caractérisation du pouvoir de la musique, la définition qu’en donne Kubrick est la plus juste que jamais je n’aie trouvée dans aucune prose ni poésie. Et puis la joie qui imprègne ce film, qui empêche le sordide, le mesquin, le calculé, c’est ce que j’avais ressenti en lisant La Chanson de Roland, ce que mon prof de Français appelle « l’esthétique du génocide joyeux ». Les coups portés sont dansants, la violence a un visage d’enfant espiègle.

 

A ce propos venons-en au personnage principal, que je voudrais défendre ici en deux mots, plus ressentis que logiquement fondés. C’est un gros morceau (la défense hein, bande de petites perverses !) donc allons-y franco (à défaut d’y aller mussolini, que les Italiens me pardonnent) : il me fait penser à Peter Pan (boum, c’est sorti, c’est con mais je m’en vas expliquer). La cruauté de l’enfant, sa joie (chanter « Singing in the rain » en dévastant une maison et violant la maîtresse…), son espièglerie bravache, une sorte de revendication anarchiste dans l’ordre gris des adultes, les blagues potaches dignes d’un taupin… cela me semble rapprocher les deux personnages tout aussi amoraux l’un et l’autre. Je vois dans ce film un pied de nez de la jeunesse indomptée à l’Ordre totalitaire, uniformisant, normatif. Un éclair (cruel et sanglant certes) de joie dans un monde morne, une fulgurance (hehe…) de jouissance au pays des soviétiques frigides. Une des plus belle scène étant le passage à tabac d’Alex par les flics lors de son interrogatoire : un flic vindicatif, les traits durs, viril, force Alex à s’abaisser en appuyant sur une plaie vive qu’il porte au visage, humiliation donc. Dans la pièce fermée, trois flics dont le bourreau, la situation est sans espoir et pourtant dans un geste vain et sublime, Alex empoigne les testicules du flic, lui infligeant une douloureuse TCH (Torsion de Couilles à la Hussarde) : c’est gratuit, stupide diront certains, ça ne fait qu’empirer les choses, mais c’est beau, c’est la jeunesse éternellement contestataire, la révolte, le refus de se résigner, l’acte gratuit… Il y a bien d’autres scènes de ce genre, citons entre autres, dans les secondes qui suivent, un regard plein de mépris et de fierté pour le porc pervers qui vient de lui cracher au visage, et, à la fin, le foutage de gueule absolument jouissif consistant à se faire nourrir par le ministre de l’Intérieur en lui mastiquent aux oreilles et surtout en se fichant totalement de son agitprop ! Dernière comparaison, celle du dandy, Alex me semble une sorte d’Oscar Wilde de l’ultra violence, professant l’Art pour l’Art, la jouissance du moment, l’élégance amorale. Et enfin l’humour que Kubrick à donné à son film et son héros, avec la scène de triolisme frénétique sur fond de Guillaume Tell de Rossini et bien d’autres tout aussi poilantes.

 

Voilou, fin de ce long, fastidieux et polémique article. Si vous n’êtes pas d’accord, le débat est ouvert. En attendant (re)regardez Orange Mécanique, et surtout, amusez-vous bien...

 

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commentaires

V
Le seul problème, c'est qu'on s'attend un peu à la suite à certains moments: quand il a essayé le traitement, c'est évident qu'il est inadapté à la société et qu'il va être la cible de tout le monde. Ou encore quand il arrive chez l'écrivain, c'est sûr qu'il va être reconnu à la voix.<br /> <br /> Mais ceci dit, très bon film.
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M
<br /> Oui, c'est sûr, ça n'est pas vraiment un film à suspens! On pourrait ajouter que c'était courru d'avance qu'il tombe sur ses ex-droogs au sortir de la cure, et surtout sur le clochard. Mais comme<br /> vous le dites, ça n'enlève pas beaucoup à la qualité du film.<br /> <br /> <br />
M
Putain moi c'est la même XD<br /> <br /> Allez les Nadsat, tous au Korova milk bar, faut pete du moloko avant la bitva <br /> Ouaf ouaf ouaf ...
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M
Entièrement d'accord.<br /> <br /> A noter toutes les expressions délirantes notamment :<br /> "Horrorshow" pour dire "bien , super" du russe " khorosho" <br /> Et ça, ça fait plaisir :D
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M
et c'est en partie pour ça que j'aimerais apprendre le Russe !

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